Un groupe de chercheurs dirigé par les Dr. Benny Trakhtenbrot et Iair Arcabi du département d'astrophysique de l'Université de Tel-Aviv a découvert un processus d'un type jusque là inconnu qui entraine la croissance accélérée d'immenses trous noirs dans l'univers pouvant atteindre une masse d'un milliard de fois notre soleil en quelques mois. Les chercheurs poursuivent leurs recherches pour résoudre enfin l'énigme de la formation de ces 'monstres' au cœur des galaxies.
L'étude, à laquelle ont également participé le Prof. Hagai Netzer de l’Université de Tel-Aviv, ainsi que des chercheurs des États-Unis, du Chili, de Pologne et d’Angleterre, a été publiée le 14 janvier dans la revue Nature Astronomy.
"Au centre de la plupart des galaxies de l'univers se trouvent des trous noirs géants qui sont un million à un milliard de fois plus lourds que notre soleil", explique le Prof. Trakhtenbrot. "Par exemple au cœur de la Voie lactée, la galaxie dans laquelle nous vivons, est situé un énorme trou noir d'une masse de 4 millions de fois celle du soleil. Malgré la fréquence de ces trous, nous ne savons toujours pas comment ils se développent et arrivent à occuper de telles masses. Il est possible que notre découverte mette le doigt sur l'un des processus responsables de ce phénomène".
Un élément lumineux
Ces dernières années, on a pu observer un certain nombre de phénomènes astronomiques dramatiques, montrant comment les trous noirs grossissent en engloutissant des étoiles ou d'autres corps célestes se trouvant à proximité. L'événement astronomique surnommé AT 2017bgt, observé en 2017, avait initialement été interprété de cette manière; mais différentes données observées nous ont amené à penser qu'il s'agissait cette fois d'un processus différent jusque-là inconnu", ajoute le Dr. Yaïr Arcavi. Le premier indice du caractère exceptionnel de l'événement observé était la présence d'un élément lumineux (des lignes d'émission d'ions d'oxygène, d'azote et d'hélium) non caractéristique des épisodes connus auparavant 'd'avalement' d'étoiles. Ces observations corroboraient les prévisions théoriques du Prof. Netzer, qui explique: "Dès les années 1980, nous avions envisagé que le processus par lequel un trou noir avale du gaz qui se trouve dans son voisinage pourrait conduire à la production de ces éléments lumineux. Mais la nouvelle étude constitue la première observation réelle de ce processus". Autre phénomène exceptionnel observé cette fois: la rapidité du processus. L'intensité de la radiation émise par le trou noir a été multipliée par plus de 50 en un temps record, probablement en quelques mois seulement.
Les chercheurs ont suivi l'événement pendant plus d'un an à l'aide de divers télescopes, tant au sol que dans l'espace, et ont confirmé l'hypothèse selon laquelle il ne ressemblait en rien à ce qui avait été observé par le passé. Ils ont notamment collecté des données à l'aide de trois télescopes spatiaux différents, dont le nouveau télescope NICER installé sur la Station spatiale internationale depuis juin 2017 et le télescope à ultraviolets du satellite Swift de la NASA (anecdote: la photographie qui a servi à l'étude israélienne était la millionième photo de Swift et à fait l'objet de célébrations à la NASA). L'équipe de recherche a récemment identifié deux autres phénomènes de trous noirs qui paraissaient comme "éclairés" et émettaient une lumière similaire à celle observée au cours de l'évènement dit AT 2017bgt. Ces trois épisodes constituent un type nouveau et intrigant d' 'alimentation' accélérée de trous noirs, inconnue auparavant.
"Nous ne savons toujours pas de manière certaine ce qui provoque cette accélération si dramatique et si soudaine de la croissance de ces trous noirs ", a déclaré le Dr. Trakhtenbrot. "On connait de nombreux mécanismes d'accélération du rythme de leur croissance, mais la plupart se produisent sur des périodes beaucoup plus longues". A présent, les chercheurs lancent un projet dont le but est de découvrir d'autres évènements de ce type et de les suivre au moyen d'un grand nombre de télescopes. "C’est la seule manière de cartographier l'ensemble des mécanismes par lesquels les trous noirs absorbent la matière, de comprendre ce qui les incite à le faire, et peut-être de résoudre enfin l'énigme de la formation de ces 'monstres' au centre des galaxies", conclut le Dr. Arcabi.
Crédit photo (en haut de l'article): NASA/JPL-Caltech
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